Mon arrière grand-père ce héros…2015

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Auguste Mauté

Né le 11 février 1874 à Mortagne au Perche, dans l’Orne.

Menuisier, résidant à Chartres, Impasse du coin cornu, marié, 2 enfants.
Cheveux châtains, yeux bleus, nez long, visage ovale, taille 1,70 m.

Voilà le peu que je connaisse de Auguste Mauté grâce à son carnet militaire aux feuilles jaunies et usées par le temps.

Auguste était mon arrière grand-père maternel, héros malgré lui dans notre famille puisque mobilisé le 1er août 1914, et mort pour la France le 23 juin 1915.

Inscrit aux monuments aux morts de la ville de Chartres, j’ai toujours eu depuis toute petite, en me promenant sur la butte des Charbonniers, un regard vers son nom gravé.

 

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A l’école primaire, pour un exposé sur 14-18, nous avions tous fait des recherches, j’étais alors la seule de la classe à avoir un aïeul victime de cette première guerre mondiale. Retour ligne automatique
Hormis ce lointain exposé scolaire, je ne m’étais jamais investie dans une quelconque recherche plus approfondie sur lui.

Mais voilà, nous sommes en 2015. Retour ligne automatique
100 ans jour pour jour que la grande guerre faisait ses ravages parmi les soldats Français, Allemands et autres combattants du monde entier.

100 ans que cet aïeul a laissé sa vie pour une France libre et délivrée de ses ennemis jurés, et je ne sais rien de lui.

Domi a depuis longtemps envie de me faire visiter Verdun et ses sites de bataille, Verdun et ses forts imprenables, Verdun et son histoire chargée d’émotions et de son rappel sur la folie des hommes.

Il était donc l’heure de faire ce rappel à la mémoire, il était temps d’honorer par un hommage décalé cet Auguste dont ma mère porte le nom.

Juste avant notre séjour en Meuse, je vadrouille un peu sur internet, je trouve une fiche militaire sur Auguste, j’y apprends son numéro de matricule, son régiment : le 13e régiment d’artillerie de campagne, et la cause de son décès à l’hôpital de Champigny sur Marne qui serait dû à une maladie aggravée contractée en service.

J’imagine que je ne découvrirais rien d’autre sur mon ancêtre, je suis déjà heureuse d’avoir trouvé ce peu de renseignements.

A ce moment, dans mon esprit, je pars donc seulement découvrir cette région que l’histoire a définitivement rattrapée en 1914.

Notre périple démarre donc par la visite des sites « incontournables » dédiés à la commémoration : le fort et l’ossuaire de Douaumont, la citadelle de Verdun , la tranchée des baïonnettes, le village rasé de Fleury, les cimetières militaires…Retour ligne automatique
Je comprends toute l’ampleur de cette guerre qui aurait dû être éclair, et qui a duré 4 longues années, je réalise ce qu’ont pu y vivre des milliers de soldats engagés malgré eux.Retour ligne automatique
Le froid, la faim, la chaleur, la maladie, la peur, l’angoisse, rien ne leur a été épargné !

Cela fait froid dans le dos, et dire que mon arrière grand-père est passé par là…Mais je ne sais ni où, ni comment ?

Verdun est l’une des places fortes principales du système de défense français. Placée face à Metz, occupée par les allemands depuis la guerre 1870, elle surveille également les voies de communication vers Paris. La région comprend 19 forts et 19 ouvrages d’infanteries.

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Nous visitons le fort de la Falouse, reconstitué avec passion par des bénévoles complètement investis. Retour ligne automatique
Contrairement aux forts de Douaumont, ou de Vaux placés sur la ligne de front, celui ci est au Sud de la Verdun.

Ce petit fort était destiné au repos des guerriers qui revenaient du front, et qui y restaient une dizaine de jours, il n’a jamais été bombardé ou pilonné, et est resté intact.Retour ligne automatique
Dès lors que l’on pénètre dans l’enceinte, nous sommes saisis par le réalisme des reconstitutions : la cuisine, les chambrées, les latrines, les bureaux des officiers ou la salle de transmissions, les cages des pigeons voyageurs, tout y est et avec d’authentiques objets de cette période.

Les mannequins de résine ont presque l’air vivants, dans des positions incroyablement proches de la réalité, certains reviennent du front et sont exténués, d’autres font une partie de carte dans la chambre, le cuisinier s’affaire à préparer les repas…Pour un peu, nous faisons à notre tour partie du décor, guettant les bombardements ou les obus trop proches.

Et mon arrière grand-père…Est-il passé par ici ?

Un des propriétaires de ce fort, ancien rugbyman, nous explique comment ils ont rénové ce fort autrefois complètement à l’abandon. Passionné de 14-18, il m’écoute attentivement lorsque je lui parle de mon aïeul, et me donne plein d’informations sur les sites internet où je dois aller chercher pour trouver trace de l’itinéraire et de l’historique de son régiment, le 13e régiment d’artillerie de campagne…

Je ressors de la Falouse avec le secret espoir de savoir par où est passé Auguste !

Nous avons trouvé refuge dans un nid douillet à Dugny sur Meuse, dans une roulotte charmante tenue par une dame adorable, Bénédicte, elle aussi, passionnée par l’histoire de sa région.

Elle nous indique qu’après avoir visité les sites de commémoration, le mieux serait de nous rendre sur le terrain, pour comprendre la réalité de cette guerre, cheminer dans les tranchées, voir le désastre des cratères de bombes, et imaginer l’enfer tout simplement.

La butte de Vauquois, et les Eparges, deux sites dont nous n’avons jamais entendu parler, attirent notre curiosité, et, évidemment, nous incitent à les visiter.Retour ligne automatique
Nous partons donc à l’Ouest de Verdun, à une trentaine de kilomètres environ.

Le village de Vauquois nous apparaît au détour d’une route de campagne toute tranquille dans le massif de l’Argonne.

Nous ne le savons pas encore mais ce village a été entièrement détruit lors de ces quatre années de combat et, bien que classé en zone rouge (séquelles de guerre), Il fût reconstruit au pied de la butte.

Nous garons la voiture et entamons une jolie grimpée vers la butte. Le sentier forestier est joli, quelques feuilles sont déjà tombées, l’automne n’est pas loin.Retour ligne automatique
Un monument aux combattants et aux morts de Vauquois surplombe le site que nous découvrons d’en haut avec stupéfaction.

Il faut le voir pour le croire, c’en est même difficile à décrire : il n’y a aucun endroit plat, le sol n’est que cratères immenses et trous gigantesques, nous n’avions jamais vu cela ! La géologie actuelle du terrain témoigne de l’intensité des combats, de cette guerre des mines qui a décimé troupes et soldats par centaines…

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Cette guerre des mines que nous comprenons grâce aux différents schémas et cartes sur le parcours nous impressionne, les explosifs utilisés détruisaient les galeries minutieusement creusées par la France d’un côté ou l’Allemagne de l’autre. Et cela a duré quatre années complètes !

Nous cheminons parmi des tranchées intactes de la ligne Allemande, des fils barbelés, des murets aux meurtrières menaçantes, des abris, des panneaux manuscrits dans la langue de Goethe, tout y est pour nous glacer le sang.Retour ligne automatique
Une chose est certaine, ici, ils ont connu l’enfer.

Et si mon arrière grand-père avait combattu ici ?

Dans ma tête je veux désormais savoir, connaître le destin de mon ancêtre héroïque.Retour ligne automatique
Je ferai tout en rentrant pour découvrir où il était pour se battre vaillamment, et où il avait finalement perdu la vie.

Le lendemain, c’est sous une pluie battante que nous nous rendons aux Eparges, là encore même sentiment de désolation, les obus ont fait leur travail de terrassement, et la nature en est ce témoin éternel !

Nous quittons Verdun, mais je ne me suis jamais sentie aussi proche de toi Auguste, très cher arrière grand-père, je vais parler de toi, transmettre ton histoire à notre famille, à tes descendants, et aux passionnés de cette terrible guerre.

Internet va alors être mon ami…

Dès notre retour, me voici en quête de toutes les informations nécessaires qui pourraient m’aider à relater ce passé. Je surfe, je scrute, je vais sur tous les sites qui évoquent le cheminement du fameux 13e RAC, le régiment dont il faisait partie.

Je trouve en premier le trésor que je cherchais : l’historique du 13e RAC, je dévore littéralement ces pages, tout y est terriblement bien décrit, de la mobilisation, jusqu’aux premières batailles contre les Allemands, des scènes d’horreur ou d’enfer vécus par ces hommes en passant par les quelques moments de répit..Retour ligne automatique
Et…Je découvre que le 13e était à Vauquois de janvier à avril 1915, la fameuse butte que nous avons visitée, et surtout, les mois précédant juste la mort de Auguste !

J’ai donc vraiment posé mes pieds dans les traces de celles de mon aïeul, et cette idée me donne une émotion particulière que je ne m’explique pas !!

Que s’est-il passé ? Quelle maladie a-t-il contracté qui l’a mis à terre et définitivement emporté ? Etait il dans ces tranchées hostiles, et quelle a été sa vie dans ces combats horribles ? Je me pose tant de questions maintenant. Il me faut des réponses.

Maman me confie précieusement le carnet militaire de mon aïeul, intact, il a l’odeur de ces vieux papiers archivés depuis des années. Un trèfle à quatre feuilles séché y est inséré entre deux feuillets. Il ne lui a pas porté chance, mais je fais terriblement attention de ne pas le perdre.

Je décortique ce document tel un trésor ! Retour ligne automatique
Chaque page dévoile un peu de Auguste : son paquetage, ses années militaires, son degré d’instruction, son acte de mobilisation.

Je l’imagine avec ce carnet en main 100 ans plus tôt, et j’aime l’idée de tourner ses pages aujourd’hui, moi, son arrière petite-fille.

Ce carnet ne suffit malheureusement pas à mes attentes, et les débuts de mes recherches tombent un peu à plat. Les archives départementales de l’Eure et Loir, ne possèdent rien d’autre que ce que j’ai déjà en ma possession, celles de Vincennes ont seulement les archives concernant les officiers, et celles de Retour ligne automatique
Pau contactées grâce à Loic, ne peuvent non plus donner suite à ma requête.

Je sens que cela va être difficile, je suis déçue, mais je ne baisse pas les bras.

Je contacte par messagerie, via le site des Chtimistes, la personne qui a publié un extrait du journal de Paul Gross, sous lieutenant du 13e RAC dès 1914, je ne m’attends pas forcément à une réponse, mais celle que je vais recevoir va me combler et me ravir !

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Très rapidement, je reçois un message de Bruno desbarats-bollet, je ne connais pas ce monsieur, il est le petit-fils de Paul Gross, et il va vite devenir mon allié incontournable pour mes recherches.

Mieux que Sherlock Hommes et l’inspecteur Colombo réunis, Bruno va me donner les clés indispensables à l’ouverture de la porte. Cette porte est celle qui va me permettre de reconstituer la vie de Auguste, certes je n’ai pas encore le trousseau complet, (et peut-être ne l’aurai-je jamais), mais je vais essayer de reconstituer ce qu’a pu être l’existence de mon arrière grand-père !

Bruno décortique bien mieux que moi les données militaires du précieux carnet, il m’explique les régiments, les organisations, la différence à faire avec la territoriale, les orientations à avoir pour obtenir des renseignements précis sur le parcours de Auguste, sur les circonstances de sa mort…Retour ligne automatique
Il est chevalier de la légion d’honneur et je suis impressionnée par ses connaissances en la matière. Véritable mine d’or, il répond patiemment à chacune de mes interrogations, m’explique, m’explique encore, il s’investit dans ma démarche au-delà de toutes mes espérances.

Grâce à Bruno, j’ai tenté d’imaginer ce qu’aurait pu être la vie bien trop courte de Auguste Mauté, simple menuisier, devenu héros malgré lui.

Le texte qui lui est consacré est à mi-chemin entre fiction et réalité, car je ne peux évidemment pas connaître l’entière vérité sur son parcours. J’ai juste essayé, d’après les différents journaux de régiment, les images, les sites visités, de retracer la vie d’un poilu, d’un combattant de cette affreuse guerre.

Mieux qu’un nom gravé sur un monument austère, Auguste reprend vie, il est un homme, un père, un soldat.

Il est mon arrière grand-père tout simplement, un peu de son sang coule dans mes veines, et je crois bien que j’en suis très fière.
P.-S.

La suite de ce récit débutera en 1914 et portera sur la vie et le destin de Auguste.

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